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Émile Borel dans la grande guerre 1914-1918. Du scientifique au combattant

Que font les hommes de science lorsqu’un conflit mondial éclate, comme en 14 ? L’exemple de Borel est ici singulier car il porte en lui pleinement son époque, imprégné de rigueur apprise à l’école de la République, devant dès lors répondre au drapeau. N’ayant plus l’âge légal pour prendre les armes, que fait-il ? Et comment les mathématiques théoriques et la physique-mathématique vont-elles pouvoir aider le pays ? Et comment, dans la tourmente, participer ? Par le hasard et la nécessité des urgences, alternativement sur le front ou au contact des plus hautes autorités civiles et militaires, Borel se révèle homme de décision, d’action et d’efficacité La fin de la guerre 14-18 est le point de départ d’une nouvelle vie.
Émile Borel in the Great War 1914-1918. From scientist to fighter
Pierre Guiraldenq
p. 21-30

Resumos

Découvrir les activités d’Émile Borel pendant la grande guerre 14-18 revient à le suivre dans deux actions complémentaires, tout en y associant son épouse. En effet, Émile Borel et Camille Marbo – nom pseudonyme – sont alors tous deux dans le premier cercle de la vie intellectuelle du pays : Émile Borel est directeur adjoint de l’ENS, plusieurs fois lauréat de prix scientifiques à l’Académie des sciences et Marguerite Borel-Appell vient tout juste de recevoir le prix littéraire de la vie heureuse (Prix Femina).
Tandis que Camille Marbo s’engage comme infirmière à l’hôpital 103, Émile Borel porte le plus grand intérêt aux méthodes de détection par le son de l’artillerie ennemie qui fait des ravages du côté français. C’est cette première action qui va le conduire à diriger, auprès de Paul Painlevé, le Service des inventions intéressant la Défense nationale, puis d’occuper les fonctions de secrétaire général au ministère de la Guerre en 1917.
La deuxième action permet de le retrouver à nouveau officier, chef d’une batterie d’artillerie lourde sur le front en 1918, exposé à tous les dangers puis, avant l’armistice, conseiller scientifique et militaire auprès des autorités italiennes.
Tout en conservant le cadre général chronologique du conflit tel qu’on le connait, cette analyse montre le contexte dans lequel Borel fut amené à intervenir dans plusieurs domaines techniques liés à la défense, nécessitant habileté et fermeté de sa part. Certaines positions abruptes associées à des facteurs psychologiques sont aussi intéressantes à découvrir, montrant l’efficacité de Borel dans sa détermination à servir les intérêts de la nation, comme il le fera plus tard dans ses actions politiques.

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Introduction

1C’est par ce conflit, qui a frappé douloureusement tant de familles françaises, que nous suivons ici Émile Borel quittant la vie universitaire et le monde de la recherche pour apporter à son pays de nouvelles valeurs d’homme responsable.

2Cette période si difficile montre le rôle capital joué par Paul Painlevé sur le parcours de Borel et leur étroite collaboration : elle explique comment Borel élargit ensuite son champ d’action vers la politique.

3Nous le suivrons pas à pas, jusqu’aux racines mêmes de ses nouvelles missions dans ce monde chaotique de la première guerre mondiale, qui vont le couper de ses travaux mathématiques si riches et reconnus.

4C’était toute la question soulevée par les conférenciers et auditeurs, venus au colloque Émile Borel à St-Affrique en 1999, sur « L’histoire des mathématiques en France au début du XXesiècle »(1) : ils ne comprenaient pas le virage pris par Borel après tant de travaux de mathématique pure, issus de sa thèse et de nombreuses publications, laissées sur le bord du chemin. Ce changement de cap pris par Borel, tout à fait singulier, s’explique aujourd’hui par les années de guerre.

5En outre, le comportement de Borel mérite d’être mieux connu quand on le compare à d’autres scientifiques, soit lors du même conflit, soit dans le cadre de guerres plus récentes : il s’agit en effet de comprendre la responsabilité de ces hommes de science qui a été analysée dans des ouvrages assez récents,Le scientifique et le guerrier de Jean-Jacques Salomon, publié en 2001 par Belin (2),Des mathématiciens et des guerres, colloque qui s’est tenu à Paris sous l’égide du CNRS en 2012 (3). Ces ouvrages montrent toute la diversité des positions tenues par certains scientifiques, tantôt hommes de guerre, tantôt hommes de paix, justifiant leurs convictions et leurs responsabilités. Mais ce sujet délicat, quoiqu’essentiel, est trop vaste pour être traité ici. Nous nous limiterons donc au strict parcours de Borel, tel qu’on le découvre au cours de ces quatre années de guerre, soit comme militaire en action sur le terrain, soit comme responsable scientifique de l’armement.

1914 - La vie universitaire dans le contexte des premiers mois de la guerre

6Que faisait Borel en ce bel été 1914, brutalement interrompu par la mobilisation générale, en date du 2 août ? Remontons le temps sur quelques semaines.

7Le dernier dimanche de juin, alors que se déroulent les examens et les concours d’entrée aux grandes écoles, le couple Borel-Appell rentre de Saint-Cyr, le soir, après une belle journée passée chez les Maurain, leurs amis, par un train de banlieue : « Le ciel est doux, le temps chaud, l’heure amicale », écrira Camille Marbo dans ses mémoires (4).

8À leur arrivée à Paris, devant la gare Montparnasse, des journaux et un titre en première page : Attentat à Sarajevo. « C’est une catastrophe, la fin d’une époque », conclut le couple Borel.

9Un mois plus tard, le 31 juillet, alors qu’ils séjournent à l’Arcouest, à quelques kilomètres de Paimpol chez leur ami Charles Seignobos, ils apprennent l’assassinat de Jaurès à l’aide d’un rudimentaire poste de TSF. C’est alors la consternation et Borel d’ajouter : « L’espoir est mort, la guerre inévitable ».

10Ils rejoignent la capitale dans la précipitation, depuis Saint-Brieuc, par un dernier train qui doit les ramener à Paris, cueillant au passage des permissionnaires rappelés : les jeux sont faits.

11À quarante-trois ans, Émile Borel n’a plus l’âge d’être sous les drapeaux et ne sera pas mobilisé dans un premier temps (figure 2). Directeur scientifique de l’ENS, où il réside avec d’autres responsables de l’École, il lui faut surveiller l’organisation nouvelle de l’établissement pour héberger un hôpital militaire auxiliaire, l’hôpital 103. Ce dernier sera mis au service des premiers blessés issus de cette même école. Élie Cartan, sergent territorial, collègue de Borel, prend la responsabilité des lieux, entouré dans cette mission nouvelle par plusieurs épouses de collègues, dont Camille Marbo (5).

12Rappelons que sur deux-cent-quarante élèves partis au combat dés la mobilisation, cent-vingt vont tomber, quatre-vingt-dix-sept seront blessés et seulement vingt-trois reviendront sains et saufs (6).

13Paul Appell, beau-père d’Émile Borel, président de l’Académie des sciences, doyen de la faculté des sciences de Paris, prend en charge la Commission supérieure des inventions intéressant la Défense nationale (sujet brûlant, tant l’artillerie allemande domine dès les premiers mois) et il crée le « Secours national », société civile cherchant des fonds pour subvenir aux familles, aux veuves et aux enfants orphelins.

14Borel comprend vite l’intérêt qu’il faut alors accorder à de nouvelles techniques pour améliorer la défense : la mise au point par deux de ses collègues, Pierre Weill et Aimé Cotton, d’une nouvelle méthode de détection par le son de l’artillerie ennemie, mérite une attention particulière. Mais ce sujet est tiraillé par le service géographique des armées, dont il dépend, et les régiments d’artillerie opérationnels qui ont bien d’autres urgences (7,8 ,9) :

15« Pas d’ampèremètres sur le front, ni s’encombrer de kilomètres de fil électrique, véritable utopie aussi coûteuse qu’inutile, sinon dangereuse », rapportera plus tard Ernest Esclangon (10). Il est temps d’éviter ces querelles.

16En effet, les arguments ne manquaient pas pour contrecarrer le projet de Weiss et Cotton puisque l’aviation et les dirigeables étaient là pour des observations aériennes, mais alors que faire quand la visibilité est nulle, que les avions ne volent plus et que les obus ne cessent de tomber ?

17Les mois passent, tandis que les états-majors réalisent que la guerre sera longue, que la portée des canons ennemis est de plus en plus grande (dix à quinze kilomètres), leurs batteries étant loin des objectifs et bien cachées. Que faire alors ?

18C’est bien dans le domaine de la détection par le son, dont Borel pressent l’intérêt, qu’il faut maintenant coordonner les efforts, essayer de comprendre les facteurs physiques qui pourraient l’améliorer, mettre en marche des équipes de calculs qui seront plus tard sous ses ordres.

19Ses liens avec la marine de guerre, puisqu’il fut longtemps examinateur au concours d’entrée à l’École navale (de 1901 à 1910), seront aussi utiles pour persuader les ingénieurs de l’artillerie navale afin qu’ils déplacent leurs gros canons et les rapprochent des zones de combat par le rail (ALVF : artillerie lourde par voie ferrée) : ces pièces d’artillerie répliqueront plus tard aux pièces allemandes qui avaient au début surpris les états-majors français et nos alliés (5, 9).

1915 - Borel sur le front avec les sections de repérage par le son (SRS)

20Les premiers mois de la guerre de mouvement étant passés avec la victoire de la Marne et la course à la mer, le front se stabilise dans les trous d’obus et les tranchées. Mais le désastre humain des premiers mois est si considérable qu’il faut rappeler en urgence les vieilles classes et combler les vides : Borel est ainsi affecté à la 20e section des secrétaires d’état-major, et il arrive au corps le 23 février 1915, comme deuxième classe. Il a maintenant quarante-quatre ans.

21Il avait fait ses classes au 142e régiment d’infanterie de Montpellier, arrivé en novembre 1892, puis maintenu sous les drapeaux jusqu’en novembre1893. Peu avant son incorporation, il avait été reçu major au concours d’agrégation de mathématiques (à vingt et un ans), ayant profité d’un an de sursis, puis il avait terminé brillamment sa thèse de doctorat es sciences mathématiques en 1894, dont le jury était présidé par Henri Poincaré (8).Compte tenu de ce passé universitaire brillant, il change d’affectation et arrive au 2e régiment d’artillerie lourde en mars 1915, promu sous-lieutenant à titre temporaire le 21 avril de cette même année. Puis, au mois de mai, il rejoint le front à la tête d’une section de repérage de la 4earmée, équipée du système Cotton-Weiss (7,9).

22La méthode Cotton-Weiss est assez simple dans son principe mais elle n’est pas encore adaptée au combat et les connaissances théoriques sur la balistique et un grand nombre de lois physiques encore mal établies sur la propagation des ondes acoustiques, restent à découvrir et à exploiter.

23Borel s’y emploie jusqu’en novembre 1915, « se dépensant sans compter pour la mise au point du procédé, d’un dévouement illimité et de belles qualités militaires. Il est inutile de parler de sa haute compétence scientifique pour faire réussir le repérage par le son sur le front de la 4e armée », dira de lui son supérieur le général de division Bourgeois, directeur technique du repérage par le son et du service géographique de l’armée (7).

24Et c’est au terme de cette première période passée sur le front que Borel reçoit sa croix de guerre, avec palme.

25Rappelons brièvement le principe de la méthode Cotton-Weiss qui relève à la fois de notions de mécanique-physique et de quelques propriétés de fonctions mathématiques bien connues (9).

26Il s’agit de déterminer le point d’origine d’une source sonore (S) à partir de plusieurs points d’écoute qui percevront le bruit émis à des instants différents. Connaissant la vitesse du son dans l’air et les différences de temps entre ces points d’écoute (là où sont placés les pavillons acoustiques), le point émetteur S peut être déterminé par une construction graphique. Celle-ci découle de la définition même de la fonction hyperbolique. En effet, les points d’écoute, pris deux à deux, sont les foyers P1, P2 d’une hyperbole définie comme le lieu géométrique des points dont la différence des distances à ces foyers est constante.

27Les deux branches de l’hyperbole, assimilées à leurs asymptotes pour simplifier, et correspondant aux deux foyers P1, P2, permettent de trouver sensiblement la position de la source S.

28En multipliant le nombre de points d’écoute on améliore la précision des mesures sur S, mais, en revanche, les risques opérationnels augmentent par la présence de personnels plus nombreux, proches des toutes premières lignes. Il reste ensuite à regrouper ces mesures locales pour achever le calcul donnant l’exacte position de S, puis répondre à cette batterie afin de la détruire.

29D’autres facteurs seront à prendre en considération, comme la topographie du terrain, la vitesse du son en fonction de la température, de l’humidité, de l’altitude, etc… enfin du grondement continu de la canonnade, quand il a lieu.

30L’analyse du bruit caractéristique d’un « coup de canon » est complexe et exige une analyse fine des enregistrements de façon à différencier l’onde balistique (ayant un sifflement aigu) de l’onde d’éclatement et surtout d’identifier l’onde de bouche (sourde et de fréquence plus basse) c’est-à-dire celle qui se produit à la sortie du canon au moment où l’obus est tiré. C’est ce point S, à l’origine du tir ennemi, que l’on veut identifier(10).

31Peu de choses étaient alors connues sur les vitesses infra - ou supersoniques et des progrès restaient à réaliser sur les matériels d’écoute, leur sensibilité, la robustesse et la qualité des enregistrements graphiques. Enfin, il fallait aussi former des spécialistes compétents.

32Au moment où Borel est sur le point de quitter son unité en novembre 1915, il apprend le décès de son neveu, le lieutenant Fernand Lebeau, qui était son fils adoptif : ce dernier est tombé sous la mitraille dans un secteur voisin du sien (140e RI). Son corps perdu dans la boue et les barbelés ne sera retrouvé dans le cimetière militaire de Suippes qu’en 1922. Diplômé de l’École supérieure de physique et chimie de la ville de Paris, puis normalien et agrégé de sciences physiques, Paul Langevin avait pris Fernand sous son aile et l’avait encouragé à poursuivre avec lui de belles recherches, si la guerre ne l’avait pas fauché à vingt-cinq ans(5). Langevin travaillait alors sur les ultra-sons pour la détection sous-marine qui sera de première importance lors de la seconde guerre mondiale.

1916 - Des travaux scientifiques dans l’urgence : Borel devient responsable du Service des inventions pour la Défense nationale (SIDN)

33Paul Painlevé (1863-1933), député de Paris en 1910, est nommé à l’automne 1915 dans le cabinet Briand, ministre de l’Instruction publique, des Beaux-Arts et des Inventions intéressant la Défense nationale. Longtemps rapporteur à la Chambre des députés sur la Défense et ayant dirigé la Commission supérieure des inventions, amorcée par Paul Appell, il demande à Borel de prendre en charge cette direction des inventions dans son ministère.

34Voici donc Borel, détaché de son régiment pour ce travail urgent, nécessaire au pays : l’avance scientifique et technologique prise par l’Allemagne reste à rattraper pendant que se poursuivent des combats épuisants sur tout le front, en particulier à Verdun.

35La direction du SIDN comprend plusieurs sections techniques, lourdes à mettre en place : améliorer l’armement chimique, les explosifs, la mécanique, l’artillerie, l’aéronautique, la marine de guerre et la guerre sous-marine, le domaine de l’électrotechnique, la radioélectricité, etc… Elle comprend aussi une commission supérieure des inventions dans le but de trier et d’apprécier les solutions utiles à court terme, une commission des brevets et enfin un comité interallié (3).

36Ce dernier comité sera essentiel dans les démarches nécessaires pour conjuguer les efforts et les capacités techniques des différents pays alliés contre l’Allemagne : le tandem Painlevé-Borel est unique car ils profitent tous les deux d’une réputation scientifique incontestable, aux États-Unis, en Grande-Bretagne et en Italie. De plus, ils sont reconnus pour leurs travaux communs : l’ouvrage L’aviation qu’ils ont écrit en 1910 est un exemple. Rappelons que Borel a inauguré en 1912 l’université de Houston au Texas, qu’il a fait un séjour prolongé dans l’Est américain, visitant plusieurs universités, tissant des liens partout. Nous en verrons l’utilité en 1917 lors de l’engagement définitif des troupes américaines, de l’arrivée de divisions plus nombreuses qui pèseront de tout leur poids pour achever la guerre.

37Bref, Borel, homme pressé, bouscule les habitudes, en particulier de ceux qui, réformés et inaptes physiquement, mais bien utiles, participent néanmoins aux difficultés du pays par des études théoriques, pour l’artillerie en particulier : abaques de tirs, corrections de tirs, etc...

38Et nous retrouvons ici tout le poids du caractère de chacun, avec l’exemple d’Henri Lebesgue, ancien élève de Borel : ce dernier, aujourd’hui bien connu par son « intégrale », est alors sous ses ordres, rattaché au Bureau de calculs de la SIDN. Les courriers sulfureux de Lebesgue montrent la rivalité à fleur de peau qui sommeille jalousement en lui depuis leurs publications respectives sur la « mesure des ensembles » et celle des « ensembles de mesure nulle » (11). Mais le temps présent exige d’autres savoirs qu’il faut exploiter.

39Réformé pour le service militaire, de santé fragile, Lebesgue est un homme solitaire, susceptible, qui déteste se disperser dans son travail. Borel a fixé à ses équipes des objectifs mais Lebesgue n’y voit pas ses repères. Les réactions de Lebesgue à l’encontre de Borel se retrouvent ainsi dans des courriers, longtemps ignorés, puis retrouvés dans les sous sols de l’Institut Henri Poincaré (IHP) à Paris, en 1988 (12).

40Ces lettres, gardées précieusement par Borel dans son bureau à l’IHP, sont aujourd’hui conservées par les archives de l’Académie des sciences. Elles révèlent, à l’extrême, la plume acerbe de Lebesgue à l’encontre de son aîné (8).

41Ainsi, le 31 mars 1916,Lebesgue écrit :

42« Mon cher ami, il est urgent que, pour la cordialité de nos relations futures, nous nous engueulions quelque peu… Hier j’étais avec Montel, vous vous êtes précipité sur lui, sans répondre à mon bonjour. Je suis intervenu dans votre conversation, vous ne m’avez pas entendu. J’ai continué à accompagner Montel, vous m’avez fermé la porte au nez. Je suis resté dans une salle sur votre passage, vous êtes sorti sans me voir et sans me chercher. Permettez-moi de vous dire seulement que vous seriez imprudent en généralisant cette façon de faire ».

43« Je n’avais pas demandé à être mêlé à ces histoires de repérage ».

44« Si vous m’aviez trouvé vraiment un collaborateur indésirable, pour mon scepticisme ou pour toute autre raison, de vous à moi ça pouvait se dire ».

45« Ce que je n’admets pas, c’est cette façon oblique, sans histoire, dont la question s’est réglée. Je hais le sans histoire ».

46Puis, à une autre date :

47« Si cela vous est utile, je veux bien faire des calculs. Mais alors dites moi expressément et dans le détail les opérations que je dois faire. Je veux bien être une machine à calcul, mais rien de plus ».

48« Je ferai donc les calculs que vous me demandez à la façon d’un bon employé idiot, rien de plus ».

49Ainsi se poursuivra leur relation ambiguë, loin du front, dans l’urgence des besoins. Nous ne connaissons pas les réponses écrites de Borel à son jeune collègue puisque Lebesgue avait l’habitude de ne conserver aucun courrier. Et probablement que Borel, oubliant ces remarques et fermant les yeux, avait bien d’autres soucis avec les états-majors et le ministère de la Guerre pour convaincre certains supérieurs sur des choix difficiles.

50Et c’est dans cette période, malgré la perte de plusieurs départements français riches en matières premières (charbon, minerai de fer), qu’une production industrielle, loin des combats, put se poursuivre : Schneider au Creusot, les usines de la Loire avec Saint-Étienne et Saint-Chamond, au Centre et à l’Ouest avec les ateliers de Bourges et Angoulême, les sociétés Commentry, Châtillon, où tant de personnels civils travaillaient nuit et jour pour l’armement.

51Au terme de cette année1916, Borel est reclassé à l’état-major de la 4e armée, promu sous-lieutenant à titre définitif, s’occupant plus spécialement du Centre d’études de l’artillerie de Vitry, grâce auquel « un grand nombre de questions relatives au tir ont pu recevoir une impulsion scientifique des plus profitables », dira de lui le général Herr, dans ses notes écrites (7).

52Terminons l’année 1916 en signalant que le beau-frère de Borel, l’enseigne de vaisseau Pierre Appell, commandant en second du sous-marin Le Monge, coulé le 26 décembre par un croiseur autrichien au large de la Yougoslavie, sera sauvé de justesse avec tout l’équipage, sauf le commandant Morillot resté à bord. Pierre Appell restera prisonnier en Autriche jusqu’en1918, puis sera libéré.

1917- L’année de tous les dangers : Borel devient chef de cabinet du ministre de la Guerre puis secrétaire général de la Présidence du conseil

53Alors que l’Allemagne déclenche une guerre sous-marine sans merci dans l’Atlantique et qu’apparaissent les premiers signes de la révolution soviétique, Paul Painlevé accepte le poste de ministre de la Guerre en mars 1917 dans le cabinet Ribot. Il succède au maréchal Lyautey qui n’a occupé ce poste que trois mois.

54Il nomme alors Émile Borel comme chef de cabinet, responsable des services techniques de l’armement, du 28 mars jusqu’au 13 septembre 1917.

55Ensuite, promu président du Conseil du 12 septembre au 16 novembre 1917, Paul Painlevé conserve Borel comme secrétaire général. Ce dernier est alors au contact des plus délicates missions. Non seulement il doit participer à des choix techniques liés à l’armement, mais il accompagne aussi Painlevé pour trancher des questions relatives à l’offensive mal inspirée du général Nivelle en Champagne, qui se solde par un échec. Le moral des troupes est au plus bas dans différents secteurs et s’accompagne de mutineries. Il s’y ajoute des mouvements de grève dans les usines d’armement. Ce n’est pas le moment de baisser la garde.

56Sur deux points, c’est une période cruciale pour Borel :

57Sur le plan opérationnel d’une part, de nouvelles décisions doivent être prises concernant des matériels nouveaux, afin de rompre avec la guerre des tranchées qui s’enlise et qui s’épuise. Concrètement, il s’agit de produire des véhicules blindés, des chars d’assaut, équipés de mitrailleuses ou de canons mobiles, capables de traverser les tranchées adverses tout en évitant de trop exposer les fantassins.

58Sur le plan diplomatique d’autre part, il faut achever de convaincre les États-Unis de s’engager massivement dans la guerre et les préparer au combat terrestre et aérien.

59Borel, dira Camille Marbo, « s’épuisa pendant des mois à la besogne, travaillant la moitié des nuits… » etc.

60Concrètement, les anglais avaient déjà conçu un cuirassé terrestre blindé et armé, équipé de chenilles, trop lourd, trop lent et peu mobile : celui-ci avait opéré sous les ordres du général Douglas Haig en 1916 dans la Somme, mais ce fut un échec.

61Du côté français, le colonel Estienne parvient à convaincre le général Joffre et plusieurs projets sont lancés : avec la firme Schneider au Creusot, avec la Compagnie des forges et aciéries de la marine à Saint-Chamond, enfin avec Renault.Une commission spéciale qui pilote un comité consultatif de l’artillerie d’assaut est créée, chargée de suivre les performances que l’on peut attendre de ces engins. Améliorer le blindage sans trop augmenter le poids, adapter la surface au sol et les chenilles pour enjamber les barbelés et les tranchées, disposer de moteurs plus puissants pour la mobilité, augmenter la visibilité des servants dans les tourelles, sont les objectifs à atteindre (13).

62Le sujet est complexe et la maîtrise technique restera trop longtemps sous la seule direction du service des véhicules lourds à moteur, qui pilotait le projet.

63Finalement, c’est en avril 1917, qu’une production de chars légers est lancée à grande échelle s’appuyant sur la solution proposée par Renault : cet engin assez rapide, sans être trop lourd, est capable de tirer tout azimut, sans modifier sa route. Ce sera la solution à la nouvelle guerre de mouvement qui contribua largement à la victoire de 1918, défendue ensuite par le colonel Charles de Gaulle dans les années trente.

64Mais les qualités attendues de ces nouveaux charsd’assaut, après bien des échecs et des hésitations dans leur mise au point technique, aura été le fruit de collaborations multiples entre les généraux Estienne et Mourret, le député Breton et bien d’autres.

65Borel, pourtant si présent au ministère de la Guerre, sachant mettre en valeur et exploiter l’outil statistique pour analyser les situations opérationnelles du moment, restera dans l’oubli à l’heure des bilans.

66Et pourtant, nul ne doute que Borel fut un conseiller de premier plan pour Paul Painlevé : en effet, ce dernier eut à gérer plusieurs situations militaires délicates, suite à l’échec de l’offensive du 16 avril 1917, puis fut conduit à nommer, dès qu’il sera président du Conseil, le général Pétain au commandement suprême et le général Foch à l’état-major interallié. Il précisera plus tard ces choix par une argumentation précise, écrite dans son ouvrage Comment j’ai nommé Foch et Pétain, publié en 1923 par Alcan (14).

67Durant les mois de septembre à novembre 1917, Painlevé ne peut éviter de sévères critiques qui lui sont adressées à la Chambre des députés. Les mutineries, les échecs militaires de l’année, la lassitude du monde civil et plusieurs affaires d’espionnage délicat, encombrent les couloirs de son ministère et auront finalement raison de lui. Il est obligé de démissionner, confronté en même temps à des soucis privés qui n’arrangent rien et qui l’affaiblissent : son fils, adolescent turbulent, aggrave les soucis du père. Rappelons que Painlevé s’était marié la même année qu’Émile Borel – en 1901 - et qu’il avait perdu son épouse quelques semaines après la naissance de cet enfant. Élevé par l’une des sœurs de Paul Painlevé, également veuve, cet adolescent restera longtemps difficile, n’ayant jamais connu l’affection d’une mère et ses conseils, négligé par un père qui a consacré tout son temps à l’université, aux sciences et à la politique (15). En effet, Painlevé avait été élu à l’Académie des sciences à trente-sept ans, en 1900.

68Et c’est dans une situation bien compliquée que Georges Clemenceau succède à Paul Painlevé le 17 novembre 1917 : la confiance lui est accordée pour poursuivre la guerre, mais avec des moyens plus favorables grâce à un armement moderne – les chars - et l’arrivée massive des troupes américaines commandées par le général Pershing.

69Borel, quant à lui, avait fini d’établir des relations soutenues de coopération entre la marine de guerre et la marine marchande, si importantes pour approvisionner les matières premières nécessaires à l’industrie lourde, venant des pays d’Afrique ou des États-Unis. Bref, tout s’arrête brutalement pour lui qui fait le choix de reprendre l’uniforme et de rejoindre l’artillerie dans les zones de combats(4,7).

70Avant ce nouveau départ aux armées, nous le retrouvons en jaquette (la fonction l’oblige) aux Invalides aux cotés de Paul Painlevé et du général Gouraud qui prendra le commandement de la 4e armée (figure 4). Ce dernier se distinguera en juillet 1918 lors des dernières offensives. Rappelons que le général Gouraud avait perdu son bras droit sur le front oriental des Dardanelles, trois ans auparavant. Enfin, Émile Borel reçoit son deuxième galon d’officier subalterne, promu lieutenant le 1er octobre 1917à l’âge de quarante-six ans (7).

1918 - Le retour au combat dans l’artillerie lourde, suivi du temps des plaies ouvertes

71L’année 1918 est une dernière occasion pour Borel d’agir sur le terrain : il reprend l’uniforme, d’abord en rejoignant, le 15 décembre 1917, le centre d’organisation de l’artillerie lourde de Noailles, puis il prend le commandement de la 6e batterie du 3e groupe du 88e RAL, qui s’adapte maintenant à une guerre de mouvement plus efficace.

72Il s’emploie à former les officiers aux dernières techniques de repérage par le son et aux réglages de tir. Les secteurs où il est affecté, quand il rejoint le front, font face aux offensives allemandes lancées en mars 1918 dans les zones de Montdidier et Moreuil au nord-ouest de Compiègne, ceci jusqu’en juin, puis sur l’Ailette et sur l’Aisne en juillet 1918. Ces secteurs correspondent aux avancées extrêmes des troupes allemandes, aussi dangereuses que celles de septembre 1914 : ces dernières offensives allemandes avaient permis d’avancer des batteries longue-portée capables de pilonner Paris. Cet effet surprise du Pariser Kanone, tirant à une distance de cent-trente kilomètres, complètement invisible, eut un effet démoralisant sur la population, occasionnant des victimes civiles. Mais ces batteries furent assez rapidement localisées grâce aux sections de repérage par le son (SRS), puis détruites.

73Borel est promu capitaine le 9 septembre 1918 à quarante-sept ans : à la demande du gouvernement italien, il est mis à la disposition de ce pays par le ministre de l’Armement et des fabrications de guerre et se rend à Rome à compter du 16 octobre 1918. Cette mission avait pour but d’aider l’artillerie italienne, y retrouvant certainement son vieil ami de Rome, Vito Volterra, affecté dans le Génie. L’Italie avait créé, comme la France, un bureau de balistique, peu après la défaite de Caporetto, en octobre 1917 (5,7).

74Deux mois avant la fin des hostilités, Borel recevait une deuxième citation, à l’ordre de son régiment, signalant : « officier joignant aux plus belles qualités militaires les connaissances techniques les plus étendues… le 28 août, chargé d’occuper très rapidement une position avancée, a réussi, malgré les pertes causées par un bombardement violent, à exécuter une mission de tir particulièrement importante ».

75En effet, Camille Marbo rappellera ces faits au cours desquels Émile Borel, par deux fois, risqua de disparaître, comme tant d’autres (4) :

  • l’une par l’éclatement d’un obus qui tua à ses côtés trois hommes de sa batterie ;

  • l’autre quand, sorti par hasard de sa cagna souterraine, celle-ci fut détruite par un projectile lourd, laissant penser qu’il était mort sous les décombres.

76La guerre achevée, Borel rejoint l’ENS et son poste de directeur scientifique. Mais, les couloirs de cette maison sont devenus sinistres : Borel n’y voit plus qu’un lieu vide « peuplé d’ombres de tous ces anciens élèves qui ont disparu ou bien de ceux qui, restés vivants, ne sont que des épaves handicapées ou des gueules cassées » (4,5).

77Parmi ceux-là, deux élèves de Borel méritent notre attention. Comme lui, ils avaient été reçus au concours d’entrée aux grandes écoles, l’École polytechnique et l’École normale supérieure, choisissant finalement cette dernière (7) :

  • Gaston Julia (1893-1978) : né en Algérie à Sidi Bel Abbes, normalien et agrégé de mathématiques,avait terminé son service militaire en 1913, immédiatement rappelé en août 1914, sous-lieutenant au 34e régiment d’infanterie. Il est blessé en janvier 1915 au visage, le nez totalement arraché. Ses courriers, adressés à Borel avant et après sa blessure, témoignent de l’attachement qu’il portait à son maître.

Soigné au Val-de-Grâce, il se plonge dans la recherche et il soutiendra une thèse de doctorat ès sciences mathématiques en décembre 1917, alors qu’il est encore convalescent. Auteur de travaux mathématiques qui porteront son nom - Les ensembles de Julia - sa carrière se poursuivra à Polytechnique et à la Sorbonne, conservant un visage définitivement meurtri. Il deviendra président de l’Académie des sciences en 1950.

  • Louis Antoine (1888-1971) : originaire des Vosges, né à Mirecourt, légèrement plus âgé que Julia, jeune professeur à Dijon, est rappelé le 2 août 1914 comme sous-lieutenant de réserve au 151e RI. Blessé trois fois, recevant cinq citations pour son courage, il perd les deux yeux le 16 avril 1917 lors de la tragique offensive du général Nivelle, près de Reims. Évacué au Val-de-Grâce, on constate qu’il est irrémédiablement aveugle. Soutenu par Henri Lebesgue, Marc Brillouin et Gaston Julia, il s’initie au Braille, crée des signes nouveaux pour les symboles mathématiques dont il aura besoin, car encouragé à poursuivre un travail de recherche. Il soutient son doctorat en 1921, concevant le « collier d’Antoine », vision abstraite d’objets mathématiques nouveaux. Il poursuivra sa carrière à la faculté des sciences de Strasbourg, puis à Rennes, préparant ses cours en Braille, puis les présentant oralement et par écrit au tableau noir, faisant l’effort de se fixer des repères devant ses étudiants.

78Ces images de misère physique extrême, dans l’approche du métier d’enseignant, sont insupportables à Borel. Ces désastres humains s’ajoutent à tous les champs de ruines du pays : il renonce à son poste de directeur des recherches à l’ENS et il commence à écrire dans La Dépêche du Midi et dans L’information politique. Ces textes sont mis au service d’une réflexion générale formant la trame d’un nouveau livre qu’il publiera chez Alcan, en 1925, Organiser (16).Sa réflexion porte ainsi sur des questions prioritaires, fondamentales :

  • Comment organiser l’Europe et préserver la paix ?

  • Comment concevoir le monde économique futur et réorganiser la vie intellectuelle ?

  • Comment mieux organiser l’Éducation nationale ?... et bien d’autres sujets brûlants qu’il faut traiter dans l’urgence.

79En quelques années, la vie de Borel se modifie de fond en comble. Ainsi, il sera élu député de l’Aveyron en 1924 pour douze ans, ministre de la Marine en 1925, maire de la ville de Saint-Affrique pendant quatorze ans, conseiller général du canton de Cornus pendant dix-huit ans, toujours fidèle à son Rouergue natal.

80Ces activités débordantes complèteront celles qui le lient bien sûr au monde scientifique, puisqu’il créera en 1927 l’Institut Henri Poincaré qu’il dirigera jusqu’à sa mort ; qu’il sera président de l’Académie des sciences et de l’Institut en 1934, plus tard membre du Bureau des longitudes, tout en conservant, à la Sorbonne, la responsabilité du cours de physique mathématique et probabilités et recevant la première médaille d’or du CNRS en 1954 (5).

81Ces années de guerre, entre 1914 et 1918, marquent ainsi pour Borel une transition forte, prolongée par de multiples engagements nouveaux, laissant à d’autres scientifiques le travail abstrait et l’émergence de concepts mathématiques nouveaux qui ont ensuite marqué ce XXe siècle.

En guise de conclusion : l’heure des bilans par une leçon borélienne

82Regardons les mois et les premières années qui ont suivi l’armistice du11 novembre 1918 :

83Émile Borel est envoyé en congé illimité de démobilisation le 9 février 1919, puis il est classé à l’état-major particulier (section technique de l’artillerie) par décision militaire du 15 juin 1922, gardant son grade de capitaine jusqu’à ce qu’il soit rayé des cadres le 19 juin 1929 à cinquante-huit ans.

84La direction qu’il avait occupée en 1916, au Service des inventions pour la Défense nationale, devient après la guerre la Direction des recherches scientifiques et industrielles et des inventions, dirigée par J-L. Breton. L’établissement de recherche de Bellevue en constituera le noyau central, plus tard rattaché au CNRS et spécialisé dans le domaine des champs magnétiques, là où Aimé Cotton poursuivra ses recherches.

85C’est enfin en 1919-1920, que l’heure des bilans approche pour apprécier les nombreuses contributions techniques exploitables après-guerre. La responsabilité en est confiée à l’Académie des sciences. En 1919, Borel n’est pas encore membre de l’Institut et c’est Jacques Hadamard (1865-1963) qui est chargé de sélectionner, avec la commission de balistique, les mémoires qui méritent attention pour des publications ou des prises de brevets. Ainsi, les comptes rendus à l’Académie des sciences feront état des travaux de l’ingénieur général Charbonnier sur la balistique intérieure et extérieure des canons ;de l’acoustique des canons et des projectiles étudiés par Ernest Esclangon, puis des calculs permettant de définir les trajectoires et les corrections à y apporter. Seront aussi cités les travaux d’Emery, Risser et Parodi à la section technique de l’artillerie, de Lebesgue et Montel à la Direction des inventions (17).

86D’autres travaux avaient porté sur les moments d’inertie et sur les vices de forme des projectiles étudiés au Laboratoire d’essais du CNAM, sous la direction de Cellerier, qui avaient montré l’importance du balourd statique et dynamique, enfin le rôle joué par « les petites perturbations de trajectoires » (dues au vent) qui fut traité par la section technique de l’artillerie, où d’autres noms apparaissent.

87Nulle part pour ainsi dire, sauf à deux reprises, n’est cité le nom de Borel. Et pourtant c’est bien lui qui dirigeait toutes ces équipes en 1916 et1917.

88Même si le capitaine Émile Borel fut proposé par le ministre de l’Armement au grade d’officier de la Légion d’honneur (Borel avait été fait chevalier à titre civil en 1909), Camille Marbo avait pris ombrage de ce manque de considération envers son mari. Elle l’a écrit dans son livre autobiographique Souvenirs et rencontres, rappelant une phrase que Borel avait prononcée, montrant qu’il se souciait peu de l’opinion ou de la reconnaissance de quiconque :

89« On fait les choses pour qu’elles réussissent, non pour en tirer gloire »

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Bibliografia

Recueil des actes du colloque Émile Borel organisé à Saint-Affrique en 1999 : « L’histoire des mathématiques en France au début du XXe siècle », archives de la maison de la mémoire, place Paul Painlevé, Saint-Affrique.

Salomon Jean-Jacques, Le scientifique et le guerrier ; Débats, Belin, Paris, 2001, 159 p.

Durand Antonin, Mazliak Laurent, Tazzioli Rossana, (dir), Des mathématiciens et des guerres, CNRS Éditions, Paris, 2013, 126 p.

Marbo Camille, À travers deux siècles, souvenirs et rencontres, Grasset, Paris 1968, 381 p., (Elle avait reçu le prix « La vie heureuse » en 1914, aujourd’hui « prix Femina », pour son ouvrage La statue voilée, Fayard, Paris, 1913).

Guiraldenq Pierre, Émile Borel 1871-1956. L’espace et le temps d’une vie sur deux siècles, imprimerie du progrès Saint-Affricain, 1999, Librairie Blanchard Paris VIe, 263 p.

Jeannin Pierre, Livre d’or de l’École normale supérieure,ENS, 1963.

Archives du Service historique de l’armée de terre, château de Vincennes, Paris.

Archives de l’Académie des sciences, Institut de France, Paris.

Archives du musée de l’artillerie, école de l’artillerie de Draguignan (Var).

Esclangon Ernest, L’acoustique des canons et des projectiles, mémorial de l’artillerie française, vol. IV, 1925.

Borel Émile, Les ensembles de mesure nulle, bulletin de la Société mathématique de France, tome 41, 1913.

Lebesgue Henri, Les lendemains de l’intégrale : lettres à Émile Borel, édité par Bernard Bru et Pierre Dugac, préface de Gustave Choquet, Vuibert, Paris, 2004, 240 p.

Detchessahar Mathieu, Lemarchand Yannick, « Des hommes et des projets dans l’urgence : la naissance du char d’assaut français, 1914-1918 », Annales des Mines, juin 2001, p. 43-54.

Painlevé Paul, Comment j’ai nommé Foch et Pétain, Alcan, Paris, 1923, 424 p.

Familles Borel – Appell - Painlevé : communication privée à l’auteur.

Borel Émile, Organiser, Alcan, Paris, 1925, 272 p.

Jacques Hadamard - Rapport à l’Académie des sciences, séance du 23 février 1920.

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Para citar este artigo

Referência do documento impresso

Pierre Guiraldenq, «Émile Borel dans la grande guerre 1914-1918. Du scientifique au combattant»Histoire de la recherche contemporaine, Tome V - N°1 | 2016, 21-30.

Referência eletrónica

Pierre Guiraldenq, «Émile Borel dans la grande guerre 1914-1918. Du scientifique au combattant»Histoire de la recherche contemporaine [Online], Tome V - N°1 | 2016, posto online no dia 15 junho 2018, consultado o 28 março 2024. URL: http://journals.openedition.org/hrc/1196; DOI: https://doi.org/10.4000/hrc.1196

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Autor

Pierre Guiraldenq

Professeur émérite des universités à l’École centrale de Lyon, après une expérience d’ingénieur dans l’industrie, il a préparé sa thèse d’État à l’École des mines de Paris, sous la direction du professeur Paul Lacombe, puis intégré la Compagnie des ateliers et forges de la Loire à Saint-Étienne comme ingénieur divisionnaire. Puis il a créé et dirigé, pendant plus de vingt ans, le département « Métallurgie physique-matériaux » de l’ECL, associé au CNRS (URA 447) qui a collaboré avec l’université Claude Bernard-Lyon I dans plusieurs formations de maîtrise et troisième cycle en sciences des matériaux où il a développé de nombreuses recherches. Il a été aussi professeur et responsable de la filière « Métallurgie » au CNAM de Lyon de 1970 à 2010. Il s’est enfin intéressé à l’histoire des sciences contemporaines, publiant les biographies d’Émile Borel et de Georges Chaudron, qui montrent l’impact des scientifiques sur la société au XXe siècle dans différents contextes économiques et politiques.

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